« Al Hayat »
Pourquoi avoir peur qu’on critique l’islam ?
La chute du monde islamique est imminente, c’est ce que « Hamed Abd el Samad » a prédit en 2010 et c’est ce qui est en train de se dérouler sous nos yeux.
Il s’agit toutefois d’une chute au ralenti qui s’étirera sur vingt ou trente ans.
Elle a, sans qu’on s’en aperçoive, débuté en Somalie et au Soudan.
Ce sont les nations les plus fragiles et les plus désorganisées qui ont pris la tête du peloton.
Mais d’autres récemment ont suivi, la Lybie, la Syrie, l’Irak et jusqu’à un certain point l’Égypte, récemment libérée des griffes des « Frères musulmans », et la Tunisie dont le destin est encore mal assuré.
L’effondrement du monde islamique c’est aussi, et surtout, l’effondrement de l’islam politique et de l’idée de califat, rêve désormais irréalisable pour certains, mais cauchemar pour tous les autres.
« Hamed Abd el Samad » a littéralement disséqué le sujet.
Dans la seconde partie de l’entretien, il parle spécifiquement de la chute du monde islamique et de l’opportunité historique qu’elle offre au monde arabo-musulman, ce dernier saura-t-il en profiter ?
Rachid :
Laissez-moi vous poser cette question qui est au cœur de notre entretien :
Qu’entendez-vous par la chute du monde islamique ?
L’islam va-t-il disparaître ?
Hamed Abd el Samad :
Non !
Il y a environ un milliard et demi de musulmans, nul ne peut prétendre qu’ils vont disparaître.
Je m’attends plutôt à un changement radical quand la « respiration artificielle » s’arrêtera avec la panne des respirateurs.
Elle surviendra dans une trentaine d’années, avec le tarissement des puits de pétrole en Arabie.
Dans trente ans si nous n’avons pas élaboré un protocole de coopération avec l’occident…
Rachid :
Vous vous attendez à ce qu’il ne reste plus de pétrole dans trente ans ?
Hamed Abd el Samad :
Les réserves de pétrole seront épuisées et le monde s’oriente vers des alternatives au pétrole :
L’énergie solaire, l’énergie éolienne.
Le monde veut développer ses propres ressources en énergie et ne veut plus dépendre de cette région qu’on appelle le Moyen-Orient, qui ne lui apporte que des problèmes et des conflits.
Donc les réserves de pétrole du Golfe arabo-persique seront épuisées et cela signifie que des catastrophes guettent les pays pétroliers s’ils n’ont pas appris à développer leur économie par d’autres moyens que l’exportation de la ressource pétrolière.
Rachid :
Ils dépendent même de la main-d’œuvre étrangère pour à peu près tout.
Hamed Abd el Samad :
L’idéologie alimentée par l’argent du pétrole piquera du nez, de la même façon que les manifestations en appui aux « frères musulmans » en Égypte se sont arrêtées, par manque d’argent.
Quand la source de financement est tarie, l’enthousiasme diminue et les gens restent à la maison.
Le même phénomène s’est produit au moment des élections.
Donc le premier facteur, l’argent, quittera la scène.
Le second facteur, la haine de l’occident ne pourra pas se maintenir :
Nous ne pouvons pas témoigner de l’hostilité envers l’occident et ses valeurs éternellement, d’autant plus qu’il est notre voisin et qu’il détient l’expertise et le « know how » dont nous avons besoin pour faire évoluer nos sociétés.
La haine nuit davantage à celui qui hait qu’à celui qui est l’objet de la haine.
Notre haine de l’occident ne lui a pas nui beaucoup, objectivement elle a été bien plus nuisible pour nous.
Nous avons établi l’éducation et l’instruction sur la détestation des occidentaux, nos jeunes ont investi énormément d’énergie dans la haine, sans résultats par ailleurs, parce que cette haine n’atteint pas sa cible et ne peut rien contre elle.
Cette énergie dépensée en pure perte, aurait pu être investie d’une façon plus profitable pour nous.
Quel impact cela aura-t-il sur la religion ?
Moi je crois que l’islam retournera comme au temps de ma grand-mère, un islam fortement teinté de religiosité populaire, et comportant un volet folklorique.
La religiosité populaire est simple…
Rachid :
Elle est faite de croyances, de légendes, de rites et de pratiques bénignes.
Hamed Abd el Samad :
À mesure que s’élèvera le niveau de culture des personnes, un certain degré de réserve sera observé, comme ce fut le cas pour le christianisme en occident.
L’occidental ne s’attarde pas à discuter de théologie, ni à parler de la trinité ou de sujets qui relèvent davantage de la foi que de la logique.
Dans trente ans une partie de l’islam relèvera de la piété populaire et une autre partie appartiendra au folklore, parce que, à l’ère d’ Internet et des débats qui y sont lancés sur différentes idées, aucune idéologie ne sera en mesure de leur résister, particulièrement celles qui se basent sur l’interdiction de penser et l’interdiction de discuter.
Dès à présent ce type d’idéologie n’a plus cours, les jeunes veulent connaître les dessous et le pourquoi des choses. ils n’acceptent pas qu’on leur impose de ne pas poser de questions.
La génération internet met au défi les « Grandes Certitudes ».
Rachid :
On ne peut plus leur dire: « Allah et son prophète en savent plus que nous! »
Hamed Abd el Samad :
Ce n’est plus possible, on ne peut non plus leur mettre sous le nez le verset du coran qui dit :
» Ne posez pas de questions sur des choses, la connaissance desquelles vous causera du tort… »
Non elle ne nous causera pas du tort, répondez aux questions et ne vous en faites pas trop, nous sommes capables d’en prendre.
À présent les jeunes ont adopté cette logique, cela ne les amènera pas nécessairement à perdre la foi, ce qu’ils risquent de perdre c’est la composante d’hostilité dirigée contre l’autre.
Et si cela ne se passe pas ainsi ce sera la catastrophe.
La chute du monde islamique se fera sur tous les plans, politique social et religieux.
Selon moi cette chute constitue une opportunité… Une opportunité.
Rachid :
De sortir du cul-de-sac…
Hamed Abd el Samad :
Nous devons reconnaître notre échec pour pouvoir un jour nous tenir debout.
Tant que nous sommes dans le trou et que nous continuons à croire que nous avons atteint le sommet de l’univers, nous n’arriverons à rien.
Nous devons nous rendre compte que nous sommes malades, sans cela nous ne ferons pas appel au médecin.
Rachid :
À la page 13 du livre vous dites :
« Ce à quoi nous assistons aujourd’hui dans le monde islamique, n’est pas un conflit entre la modernité et la tradition, comme certains le prétendent, mais plutôt l’agonie de la culture arabe et islamique, laquelle se révèle impuissante à fournir des réponses crédibles aux interrogations incessantes de notre époque.
Il s’agit d’un état de confusion et de convulsion intellectuelle qui conduit certains à la schizophrénie, d’autres au désespoir et d’autres encore à l’extrémisme et à la violence.
Cet état d’indigence culturelle et spirituelle, ils tentent de le cacher derrière le voile d’une religiosité frelatée et sous des cris assourdissants à propos de sujets futiles.
C’est ainsi que l’islam disparaît graduellement des cœurs et des consciences et ne se manifeste plus que dans les barbes et les slogans.
Car celui qui hurle au nom de son dieu dans les ruelles ou à travers les écrans, l’a perdu depuis longtemps dans son for intérieur. »
Hamed Abd el Samad :
Il s’agit d’un mécanisme psychologique courant.
Je me souviens quand j’étais petit, je cherchais à m’affirmer en élevant la voix.
Mon père m’a pris à l’écart et m’a dit quelque chose qui m’est toujours resté à l’esprit, il m’a dit:
« Si tu veux me convaincre que 1 + 1 = 2, tu n’as pas besoin de crier, mais si tu veux me convaincre que 1 + 1 = 15, il faudra que tu te mettes à sauter partout. »
Celui qui a la logique de son bord, n’a pas besoin de crier.
Les gens voient les islamistes hurler, gesticuler, menacer et user de violence et ils trouvent que ce sont là des signes qui ne trompent pas de la force de l’islam politique.
Tel n’est pas le cas, ce sont plutôt des signes de sa faillite…
Des signes de faillite.
Le fort ne crie pas, c’est le faible, celui qui refuse de reconnaître sa faiblesse et sa défaite, celui-là se plaît à crier.
Cela ne veut pas dire qu’il n’est pas dangereux, au contraire, il est même très dangereux parce qu’il se trouve dans la phase terminale du désespoir.
Même constatation au sujet des signes religieux externes qui se répandent un peu partout, ils sont un signe de faiblesse et la preuve que les musulmans refusent de reconnaître la crise dans laquelle ils sont plongés.
Mais ce refus de prendre acte de la gravité de la situation on le rencontre également chez les réformateurs. Ils n’ont pas le courage de désigner les choses par leur nom.
La maison est à la veille de s’écrouler, mais le réformateur se sent mal à l’aise de dire la vérité à ceux qui l’habitent, après tout ce sont des voisins et des amis et il les aime bien !
Rachid :
J’ai vu qu’à la page 20 vous comparez la situation du monde islamique au naufrage du Titanic :
« Le vaisseau de l’islam se retrouve seul et gravement endommagé au milieu de l’océan glacé.
Le sauvetage semble irréalisable, on est sans nouvelles des passagers de la troisième classe, ils semblent piégés dans le ventre du navire.
Les passagers fortunés tentent de fuir sur les rares canots de sauvetage, les chefs religieux continuent de répéter les mêmes rengaines et exhortent les gens à la patience, les réformateurs de l’islam ressemblent aux musiciens du Titanic, ils continuent à jouer sans arrêt, pendant que le vaisseau s’enfonce dans l’océan, ils savent pourtant que personne ne les écoute. »
Quelle étrange comparaison!
Hamed Abd el Samad :
C’est exactement ce que font les réformateurs de l’islam.
Personnellement je veux que la situation change.
Quand j’ai écrit ce livre, ou quand je rédige un article, je me sens motivé par mon amour pour la société où j’ai grandi.
Je ne la déteste pas, est-il possible de détester sa mère, ses proches et ses amis ?
J’incite donc au changement.
Les réformateurs eux, vous disent :
« le peuple n’est pas encore prêt !
» Oui mais quand sera-t-il prêt ?
Pouvez-vous me fixer la date et l’heure, si c’est dans vingt ans je serai au rendez-vous.
De tels propos nous les entendons depuis cent ans, depuis le temps de « Taha Hussein », à qui on a signifié que la société n’est pas disposée à assimiler ses idées.
Alors quand le pourra-t-elle ?
Quand le paquebot sera en train de sombrer ?
Moi je constate le choc :
le paquebot de l’islam s’est heurté à l’iceberg de la modernité, l’eau s’est engouffrée dans les ponts inférieurs.
Nous devons trouver rapidement une issue, quitter le navire au plus vite, mettre au rancart cette idéologie.
Mais il y a des gens qui disent que les choses doivent demeurer telles qu’elles sont, immuables.
La scène du musicien dans le film, de mon point de vue est superbe, il sait que personne ne lui prête l’oreille, que le paquebot est en train de sombrer, mais il continue de jouer.
Cette allégorie est semblable à celle de la maison qui menace de s’effondrer.
Je suis quelqu’un qui n’éprouve aucune gêne à dire à mes voisins et amis :
« Mes amis cette maison va s’effondrer bientôt, je vous prie de quitter au plus vite et de vous bâtir une nouvelle maison.
Ou bien vous pouvez démolir celle-ci et en construire une autre à sa place. »
Telle est ma position.
Celle des réformateurs est à l’opposé, ils disent aux habitants :
« Procurez-vous une peinture de qualité, nous allons repeindre à neuf la maison et elle sera plus belle ! »
Mais la peinture n’empêchera pas la catastrophe, la maison s’effondrera sur ses occupants, c’est pourquoi il est important de démolir dès que possible et en construire une autre.
On dirait que nous ne voulons pas reconnaître que notre maison a pris de l’âge, que nous ne l’avons pas entretenue correctement, et qu’il est dangereux de l’habiter.
C’est à peu près cela que j’ai voulu suggérer dans mon livre.
Rachid :
Si l’on se fie à vos propos, il n’y a aucun courant réformateur à l’intérieur de l’islam qui ait des chances de réussir.
Hamed Abd el Samad :
J’ai des amis qui s’activent à l’intérieur de l’islam, que font-ils ?
Ils tentent de trouver quelques versets du coran qu’ils s’efforcent de boulonner sur notre époque, en espérant qu’ils feront l’affaire.
Mais quelque temps plus tard, du fait qu’ils ne sont pas adaptés à la situation, ou parce qu’ils ne se trouvent pas à leur place naturelle, les boulons se détachent de la coque du navire et l’eau s’engouffre de nouveau dans le Titanic.
Une réforme basée sur une compréhension différente de la religion est impossible de mon point de vue, parce que la société ne doit pas reposer sur une idéologie religieuse.
La religion est intimement liée à la spiritualité de la personne, sa place est dans son cœur et aucune force extérieure ne peut l’en déloger.
La réforme sur le plan politique et social doit reposer sur le principe de citoyenneté et non sur une relecture à visée réformatrice du coran et des hadiths.
La réforme de la pensée religieuse de son côté doit viser l’humain et la notion de sacré.
Il faut qu’il y ait un certain degré de relativité, à savoir que ce qui est sacré pour moi, ne l’est pas nécessairement pour les autres, et que je ne suis pas autorisé à leur imposer ma conception du sacré.
Moi je voudrais que cette approche soit prise en compte et qu’il n’y ait pas d’interdit.
Celui qui ne reconnaît pas l’origine divine du coran est dans son droit quand il affirme calmement :
« Pour moi le coran n’est pas la parole d’Allah. »
Dans son cas s’exprimer ainsi n’a rien de destructeur, c’est simplement l’expression d’une opinion, il en résulte que nul n’est autorisé à le tuer.
Ceux qui croient au caractère divin et sacré du coran n’ont rien à craindre de ceux qui n’y croient pas.
Croire que l’on puisse réformer la société par la réinterprétation de tel ou tel verset du coran est illusoire, pourquoi ?
Parce que si je voulais par exemple encourager la coexistence et les bonnes relations entre chrétiens et musulmans, et faire en sorte qu’elles s’appuient sur l’islam, je dirais que le Prophète nous a recommandé de bien traiter les chrétiens, qu’il a dit que les gens du livre ont bon cœur, j’ajouterai qu’un verset dit que les chrétiens sont ceux qui témoignent le plus de bienveillance à l’égard des croyants, etc.
Si je me basais sur ces passages pour réaliser la coexistence, les fondamentalistes qui la rejettent citeront de leur côté d’autres passages du coran à l’appui de leur orientation, tels que :
« Sont mécréants ceux qui professent que Jésus fils de Marie est Dieu. »
Et :
« Tuez-les partout où vous les trouverez. »
Etc.
Si je cite un verset par ci, ils en citeront un autre par là et nous ne nous en sortirons jamais.
On peut même prédire que les fondamentalistes finiront par avoir le dessus, parce que les versets qu’ils citeront seront plus explicites que tout ce que je pourrai trouver.
C’est ce qui me porte à dire qu’on ne doit ni justifier la violence, ni décréter la tolérance en se basant sur les textes sacrés, la coexistence doit reposer sur des bases strictement humaines.
L’intérêt des uns et des autres l’exige, même s’ils ne s’entendent pas ou ne se témoignent pas de sollicitude particulière, et malgré qu’ils expriment des idées diamétralement différentes, c’est tout.
L’idée ne doit être opposée que par une autre idée non par un « RPG » (lance-grenade largement utilisé par les « jihadistes »).
Rachid :
En lisant votre livre j’ai découvert l’existence de « lignes rouges » auxquelles se heurte tout réformateur, de telle sorte que le courant « salafiste » et l’État islamique finissent toujours par avoir le dernier mot.
Pouvez-vous nous parler de ces lignes rouges et de leur impact sur les tentatives de réforme.
Hamed Abd el Samad :
La réforme et les lignes rouges sont antinomiques, elles s’opposent totalement.
Il faut rejeter l’idée selon laquelle certains sujets ne peuvent jamais être abordés et que celui qui ose s’en approcher sera puni, parce que cela mène à paralyser la pensée.
L’histoire de l’islam est remplie de réformateurs qui, hélas, n’ont pas été capables de susciter un élan durable.
Nous avons eu les « moutazilites », nous avons eu « Ibn Rushd » (« Averroès »), et dans les temps modernes « Mohammed Abdou », « Taha Hussein » et « Nasr Hamed Abou Zeid », mais ce n’étaient que de petits ruisseaux au milieu du désert qui ont fini par s’assécher.
Ils n’ont pas été capables de donner un élan suffisamment puissant pour passer outre les lignes rouges.
Rachid :
Pourquoi n’ont-ils pas été capables de donner cet élan ?
Hamed Abd el Samad :
Parce qu’à l’opposé, le courant orthodoxe « salafiste » s’est avéré trop puissant du fait que les lignes rouges lui servent de remparts.
Le réformateur se fait dire :
« STOP , ne dépasse pas les limites, le coran a dit ceci ou cela, ne touche pas au Prophète, n’aborde pas tel sujet, ne parle pas de « Darwin », etc. »
On se sert du sacré pour bloquer le chemin.
La vraie réforme consiste à ramener les lignes rouges au niveau de l’individu qui tient à les respecter, comme c’est le cas pour un ami « salafiste » qui m’est très cher.
Cet homme m’a dit textuellement :
» Si je devais dans ton cas tenir compte des lignes rouges, je n’aurais d’autre choix que de te tuer !
Rachid: Ah!
Hamed Abd el Samad :
Mais il a ajouté :
» J’ai décidé de vivre exactement comme le Prophète l’a ordonné, mais seulement à l’intérieur de ma maison et pas plus loin ! »
Je n’ai aucun problème avec ce type de pratique religieuse, cet homme applique ses préceptes sur lui-même et ne se reconnaît ni le droit ni l’obligation de me forcer à les suivre.
Ses lignes rouges le concernent personnellement et il ne les impose à personne d’autre.
Il faut d’autre part admettre que les lignes rouges qu’on impose à la société instillent la peur.
Elles engendrent la lâcheté et le mensonge.
La peur, la lâcheté et le mensonge sont des plaies qui défigurent les sociétés.
La personnalité de l’individu, qu’il s’agisse d’une jeune femme ou d’un jeune homme, s’en trouve mutilée et rendue stérile, à force de se mentir à soi-même et à autrui.
L’individu doit pouvoir se libérer de tous ces fardeaux, de toutes ces valises pesantes qui entravent son mouvement et qui l’écrasent, pour entreprendre son voyage d’un pas léger.
Rachid :
Vous avez traité de l’échec des réformateurs, j’aimerais quand même parler du courant coraniste qui rejette les « hadiths », la « Sira » du Prophète, l’histoire de l’islam des origines et d’autres choses comme le « tafsir » (l’exégèse du coran) et qui s’en tient au coran, au coran et rien d’autre.
Il y a aussi des gens comme le prédicateur « Adnan Ibrahim » qui tentent d’introduire la notion de « raison » dans l’examen des textes et qui font le tri dans les « hadiths », ceux qui sont compatibles avec la raison sont retenus, ceux qui s’y opposent sont mis de côté.
Croyez-vous que ces gens ont des chances de réussir, ou qu’ils vont se heurter également aux lignes rouges?
Hamed Abd el Samad :
Ils se heurteront aux lignes rouges, et de toute façon ceux qui font usage du « takfir » (l’excommunication islamique) ne font pas de différence entre un réformateur et un apostat comme moi.
Moi je crois qu’ils perdent leur temps.
Cependant ils pourraient jouer un rôle positif.
L’intérêt de ces courants réside dans l’attrait qu’ils exercent sur les jeunes, dans la mesure où ils les incitent à réfléchir et à examiner les sujets d’un point de vue différent.
Mais la réforme ne peut se faire sur des bases religieuses, la réforme de la société doit se faire sur la base de la citoyenneté.
Rachid :
Et cela pourrait même s’avérer négatif, si les réformateurs s’avisent d’embellir ou de maquiller ce qui devrait être changé, ou comme vous le dites, de repeindre une maison qui menace de s’écrouler.
Et pour ce qui est du coran, ils ne peuvent faire autrement que l’étirer au-delà du raisonnable, pour lui faire dire ce qu’ils aimeraient y trouver.
Il y a du positif chez les réformateurs mais aussi du négatif.
Hamed Abd el Samad :
Bien sûr, car même si nous mettons de côté la « Sira » du Prophète, les « hadiths », l’histoire de l’islam et le « tafsir » et que nous nous en tenons seulement au coran, nous allons nous heurter à des choses incompatibles avec le monde moderne.
Le coran approuve les « malakat el yamine » (les esclaves sexuelles) il légalise l’esclavage en général, il valorise le combat à mort dans le sentier d’Allah et prescrit l’amputation des extrémités comme châtiment...
Il y a du beau dans le coran et du laid, on y trouve la tolérance mais également la violence.
Cela dépend de celui qui le lit et qui observe ses commandements.
Moi je recommande de placer le coran à sa place dans son contexte, celui du septième siècle quand il servait à répondre aux préoccupations des gens de son temps.
Ces gens avaient une mentalité particulière, ils vivaient dans un milieu géographique particulier.
Le coran, par exemple, parle du paradis comme d’un endroit où on ne subit pas la chaleur du soleil.
Si j’en parlais à des suédois ils seraient déçus car ils préfèreraient un paradis ensoleillé !
Le coran reflète la mentalité et le goût des hommes de son temps, du fait qu’il a « palabré » avec eux et qu’il a fourni des réponses à leurs questions, comme par exemple au sujet du vin, est-il permis d’en boire ?
Ou au sujet de l’impôt religieux, il a donc échangé avec la société de son temps.
Or il n’est pas possible pour le coran d’échanger avec la société d’aujourd’hui du fait de l’absence de communication en direct, comme au temps du Prophète.
Rachid :
Donc le coran ne fait qu’imposer !
Hamed Abd el Samad :
Il impose les « ententes » qu’il a négociées au 7e siècle, pour régler les problèmes de cette époque.
Mais nos problèmes et nos défis en ce 21e siècle sont radicalement différents.
L’esclavage sexuel ou l’esclavage tout court ne sont plus acceptables, en Égypte personne ou presque ne peut concevoir qu’un copte soit traité en dhimmi, qu’il n’ait pas le droit à une carrière militaire et qu’il soit contraint de payer la « jizia » (la rançon).
Celui qui veut vivre dans une société moderne doit accepter que cette société se dote d’une structure et de méthodes modernes.
Nous craignons de nous appuyer sur ce que le monde a réussi à mettre au point, parce que nous avons honte de nous-mêmes, honte de n’avoir pas su créer au cours des siècles passés nos propres structures politiques, sociales et économiques.
Nous refusons d’imiter les autres, mais l’imitation quelque fois est nécessaire ou inévitable, comme quand on se sert du téléphone, de la télé et des autres instruments qui sont autant d’inventions où nous n’y sommes pour rien.
Il existe donc un type de gouvernement, que l’occident a mis au point et qui a largement fait ses preuves, bien qu’il ait des défauts, pourquoi ne pas l’adopter ?
Pourquoi ne pas comparer les pays qui ont séparé la politique de la religion, avec ceux qui les ont mélangées ? Comparer l’Iran, l’Arabie Saoudite, la Somalie, le Soudan, l’Afghanistan d’un bord et la Suède, la Norvège, l’Allemagne de l’autre ?
Et examiner objectivement ce que chacun de ces deux groupes de pays est parvenu à réaliser.
Rachid :
Vous avez abordé le sujet des manuels scolaires qui sont remplis de choses qu’on inculque aux élèves dès l’école maternelle, et je suis d’accord avec vous quand vous attribuez au système éducatif une place centrale dans la crise que nous traversons.
Parmi les points que vous soulevez à la page 28 j’ai relevé ceci :
« Nous injectons à nos enfants dans les écoles, et à nos dévots dans les mosquées, la haine d’un ennemi que leurs mains ne peuvent atteindre, ce faisant nous détournons de nos sociétés des énergies dont elles ont absolument besoin pour réaliser les changements, et nous détournons leur attention de sujets autrement plus importants. »
Quand, à travers les manuels scolaires, nous apprenons à nos enfants à haïr, quand nous enseignons par exemple qu’Allah a changé les juifs d’un certain village en singes et en porcs, que les juifs d’aujourd’hui sont les frères ou les descendants des singes et des porcs, que les chrétiens sont des « kouffars » (des mécréants), que leur témoignage n’est pas valide etc.
Trouvez-vous que ces éléments ont quelque chose à voir avec la chute du monde islamique ?
Hamed Abd el Samad :
Évidemment, comme je vous l’ai mentionné déjà, si la civilisation arabe du Moyen-âge a atteint un tel niveau d’avancement, c’était à cause de son ouverture.
Elle a traité les adeptes des autres cultures comme des êtres humains ayant des habiletés particulières, dont elle a su profiter.
Les traducteurs, les savants, les médecins ont été accueillis en son sein et elle a assimilé leur savoir.
Ce n’est pas l’islam en tant que religion qui a édifié cette civilisation, s’il en avait été autrement, la Mecque et Médine seraient devenues les centres principaux du savoir.
Mais ces centres se sont trouvés à Bagdad, au Caire, à Damas, en Andalousie, là où il était possible de rencontrer d’autres cultures et les adeptes des autres religions, lesquels ont transmis leur patrimoine scientifique et intellectuel à la culture arabe.
Avec ce type d’enseignement, nous érigeons un mur culturel, affectif et moral entre nous et les adeptes des autres religions et des autres cultures.
Ce mur nous empêche de tirer profit de leurs réalisations et de coopérer avec eux, au contraire il nous incite à les éviter, à nous en méfier, à les suspecter, à polémiquer avec eux, et même à leur déclarer la guerre.
Une guerre largement fantasmatique, qui n’a rien de concret, comme s’il nous était possible d’appareiller une flotte de cuirassés pour aller détruire l’Europe et l’Amérique !
Nous gaspillons l’énergie de nos jeunes dans cette haine, les réduisant à se battre contre des moulins à vent sans résultat.
Alors pourquoi dépenser ces énergies en pure perte ?
Partout dans le monde l’enseignement consiste à apprendre à l’enfant à réfléchir et à prendre des décisions, à lui apprendre comment bien penser et non quoi penser.
Rachid :
Mais notre enseignement c’est bien souvent du par cœur.
Hamed Abd el Samad :
Nous leur disons quoi penser, nous ne leur donnons même pas le choix entre deux possibilités.
Nous disons à l’élève :
« C’est ça la vérité et c’est ce que tu dois penser, ton Histoire est grandiose, elle est sans défaut, bien au-dessus de celle des autres ! »
Le danger de ce type d’enseignement est qu’il ne peut former des personnalités solides.
Quand un individu qui a été formé par cet enseignement se retrouve dans la société occidentale, sa personnalité se fissure au premier contact, malgré son intelligence et son savoir.
Rachid :
Elle ne résiste pas au choc.
Hamed Abd el Samad :
Parce qu’elle n’a pas la solidité nécessaire pour se mouvoir dans une société qui sur le plan intellectuel privilégie l’analyse rationnelle et non les certitudes immuables.
Le musulman qui discute avec l’européen à coup de citations et d’arguments tirés du coran, ne sait pas au départ que son argumentation n’a aucune valeur.
Il découvre tout d’un coup qu’il ne lui suffit pas de dire avec assurance :
« c’est mentionné dans le coran c’est donc la vérité ! »
Son interlocuteur européen exige de lui des arguments rationnels qu’il lui est impossible de trouver, n’ayant pas appris à raisonner.
Rachid :
Traitant du même sujet vous dites :
« Un coup d’œil dans les manuels d’histoire du Yémen, d’Arabie Saoudite, de Syrie et on en arrive aux mêmes conclusions :
Les autres sont la cause de nos malheurs, l’occident est le Grand Satan !
Le plus étrange est que la plupart des chefs d’État arabes sont les alliés de l’occident, ils préservent ses intérêts, lui témoignent leur loyauté et reçoivent de sa part de l’aide et des armements. »
En moins de quatre lignes vous avez ciblé une réalité bien curieuse, comment expliquez-vous ce paradoxe ?
Hamed Abd el Samad :
Tout dictateur se doit de noyer la pensée libre, s’il veut maintenir son contrôle sur le peuple.
Il doit le convaincre que le règne actuel est exceptionnellement reluisant, que l’ennemi extérieur est responsable de ses problèmes.
Nous sommes donc en présence d’une contradiction, le chef de l’État est l’ami de l’occident, et en même temps il incite à la haine de l’occident dans les manuels scolaires.
Il s’efforce de montrer l’Europe et l’Amérique sous un mauvais jour pour que les gens ne se mettent pas à rêver à la démocratie.
Mais les choses commencent à changer parce que le manuel scolaire n’est plus l’outil principal d’apprentissage. D’autres ressources, en particulier Internet, ont commencé à diffuser des informations différentes :
« Tu me dis que l’Amérique ressemble à ça, mais la « BBC » me montre une image très différente, sur le Net j’ai des amis qui me disent autre chose. »
On en vient à présent à modifier les manuels scolaires, histoire de préserver la crédibilité du système d’éducation.
Il faut les épurer des éléments qui incitent à la haine et à la diabolisation de l’autre.
L’autre a toujours été diabolisé.
Diviser le monde entre bons et méchants mène à la confrontation finale d’où ne pouvons sortir que perdants, parce que l’autre s’est équipé avec des armes dont nous ne détenons pas l’équivalent.
Isoler nos enfants, couper leur esprit du monde réel, les obliger à vivre dans un monde fait d’illusions, où notre Histoire est idéalisée, et où les autres sont responsables de nos tragédies, cette vision ou plutôt ce regard que nous jetons sur le monde, nous a coûté cher et continue de nous coûter très cher.
À présent que nous en avons terminé avec les « Frères musulmans » en Égypte, qui nous débarrassera des maîtres d’école et des « imams » de mosquées qui continuent d’instiller ces idées et cette haine.
Nous nous empoisonnons nous-mêmes et nous nous empoisonnons les uns les autres, et pour finir nous appelons ça notre identité !
Rachid :
Je cite un autre passage de votre livre :
« La question qui se pose actuellement, n’est pas de changer certains articles de la constitution, tels ceux qui concernent les principes qui régissent les élections, elle concerne plutôt la compréhension qu’ont les gens de la logique démocratique et leur aptitude à participer à la vie politique, c’est bien plus cela qui sera le véritable moteur du changement. »
Vous semblez dire que même si la constitution est modifiée et que des règles pour assurer des élections crédibles sont établies, cela ne fera pas de différence.
Hamed Abd el Samad :
La démocratie n’est pas un fruit qui tombe de l’arbre prêt à être mangé, la démocratie, c’est l’arbre lui-même.
On doit le soigner et l’arroser, jusqu’à ce qu’il atteigne la maturité et donne des fruits.
Si nous vivons dans une société détraquée, les résultats des élections le seront tout autant.
Nous avons vu ce que les élections en Égypte ont donné comme résultats.
Je l’avais d’ailleurs écrit dans mon livre.
La pratique démocratique ne se résume pas aux outils de la démocratie, il faut en premier lieu ancrer la notion de citoyenneté, ce qui veut dire que Rachid est chrétien, moi je suis musulman, moi voisin est athée, un autre est bahaï, leur religion les concerne personnellement, ils vivent dans la même société que moi, je ne les juge pas d’après leur religion et je les traite comme des citoyens détenteurs des mêmes droits.
Si on me permet de construire une mosquée, on doit te permettre de bâtir une église, et à l’autre un temple pour son culte, c’est une question de droit.
En quoi cela me dérange si les « chiites » bâtissent un lieu de culte pour eux, où est le problème, de quoi dois-je avoir peur ?
La vague « chiite » ou la vague de conversion au christianisme dont on parle en Égypte suscite l’inquiétude, pourtant les musulmans en Europe ne se privent de prêcher l’islam librement et de convertir des gens.
Pourquoi donc cette peur si l’on est sûr de sa foi ?
Pourquoi avoir peur qu’on critique l’islam, du moment qu’on est convaincu que l’islam est fort ?
S’il l’est vraiment, alors ses adeptes doivent supporter la critique qui le vise, et si un musulman abandonne l’islam pour une autre religion, pourquoi en faire une tragédie ?
Rachid :
Dans votre livre on trouve quelques prédictions, je tiens à souligner qu’il a été publié en 2010, avant les révolutions du « printemps arabe », vous avez écrit ceci :
« Les pays arabes en particulier, sont menacés d’effondrement.
La démographie, la désertification, le niveau de consommation, la fermeture d’esprit ne cessent de croître.
La production, le niveau d’instruction, les ressources naturelles sont en constante diminution.
Le tarissement prévisible des puits de pétrole, les changements climatiques menacent l’agriculture, la production de denrées alimentaires et le tourisme.
L’Égypte, la Jordanie, la Syrie et le Maghreb connaîtront-ils prochainement le même sort que l’Algérie, le Soudan et la Somalie ? »
Vous avez écrit cela en 2010.
Il se passe des choses en Égypte, en Syrie la guerre civile se poursuit sans répit.
S’agit-il de prophétie, d’intuition, de déduction, d’un pur hasard ou d’une lecture précise de la situation et de ce qu’elle pourrait engendrer ?
Hamed Abd el Samad :
C’est simplement une lecture de la réalité, je ne suis ni prophète ni devin et je ne possède pas de boule de cristal. Toute personne qui use de logique, qui réfléchit et qui observe ce qui se passe en Égypte, en Syrie…
J’ai visité tous ces pays et j’ai observé leur société, j’ai perçu un bouillonnement interne et en même temps la stagnation et l’immobilisme en surface.
J’ai flairé l’odeur d’une explosion prochaine.
Je n’ai pas dit qu’il y aura des révolutions, j’ai parlé qu’il y aura une explosion, à cause du nombre extrêmement élevé de jeunes, du taux incroyable de chômage et de la fermeture d’esprit.
Tous ces ingrédients assemblés au même endroit et au même moment, m’ont convaincu de l’imminence de l’explosion. J’ai prédit que l’État perdra son contrôle sur les gens, que les gens perdront le contrôle sur eux-mêmes et que nous assisterons à des scénarios de guerre civile, parce que le monde arabe a négligé ou a tardé à faire ses devoirs alors qu’il était encore temps.
J’ai dit aussi que cette explosion et cette chute pourraient ouvrir la voie à un nouveau début.
La chute provoquera une prise de conscience, à l’effet que cette fois l’édification de la société doit se faire sur des bases saines, sur la base de la non-discrimination entre la femme et l’homme, entre musulmans et adeptes des autres religions, que la société soit établie sur des principes découlant de la raison et non sur des bases dogmatiques.
Si l’on veut vivre dans le monde d’aujourd’hui il faut accepter les principes de la modernité.
La loi de la nature c’est la pluralité et la souplesse, celui qui s’y oppose se condamne à tomber.
Rachid :
Que répondez-vous à celui qui dit que « Hamed Abd el Samad » a eu un choc culturel quand il a abordé la civilisation occidentale ?
Il a ressenti de la colère, s’est rebellé contre la religion, a abandonné l’islam, est devenu un athée.
Il a écrit un livre pour ventiler sa haine, il dit que le monde islamique va s’effondrer, mais le monde islamique a 1400 ans et ne s’est pas effondré, ce n’est donc qu’un fantasme, des souhaits qu’il lance à la face du monde, à l’exemple de beaucoup d’autres qui ont déclaré la guerre à l’islam et on prédit sa chute, mais l’islam est inébranlable en dépit de la haine, de l’envie…
Hamed Abd el Samad :
Pour ce qui est du choc culturel je ne peux pas le nier, mais ce genre de choc je le souhaite à tout le monde parce qu’il nous aide à changer notre façon de réfléchir et nous amène à penser d’une façon plus rationnelle.
Pour ce qui est de la haine que je suis supposé ressentir, je peux dire qu’au contraire, j’aime la société dont je suis issu, ainsi que toutes les sociétés arabes, et j’aimerais donc qu’elles fassent partie des meilleure sociétés, et que mes amis puissent jouir de la meilleure qualité de vie possible.
À ceux qui prétendent que ce que j’ai écrit relève de la calomnie, je leur réponds :
« regardez honnêtement autour de vous, soyez francs avec vous-mêmes, voyez comment fonctionnent les sociétés où vous vivez et comparez-les au reste du monde.
Si vos sociétés trouvent grâce à vos yeux, vous avez un grave problème !
Si elles ne vous plaisent pas, lisez mon livre vous trouverez de quoi alimenter votre réflexion.
Rachid :
Où trouverons-nous la solution.
Vous avez prédit la chute du monde islamique et ça nous donne le cafard, parce que nous espérions autre chose.
Que faire ?
Attendre la chute et tenter de sauver ce qui peut être sauvé, ou bien entreprendre quelque chose pour la prévenir ? Mais vos prédictions font état d’une chute inévitable, que doivent faire les jeunes ?
Avons-nous matière à espérer ?
Hamed Abd el Samad :
La chute a effectivement commencé, celui qui sait lire les signes du temps, la voit clairement.
Nous devrons nous réinventer en peu de temps, nous traversons une étape que l’Europe a vécue aux 19e et 20e siècles, et nous reproduisons ce qu’elle a fait soit la réinvention de l’État, mais ce processus est coûteux.
Nous devrons réaliser les changements en très peu de temps.
Nous ne disposons pas de centaine d’années pour accomplir la tâche.
Nous devons reconnaître le principe de citoyenneté, la constitution doit être inclusive et exempte de discrimination.
Il est indispensable de nettoyer le système éducatif de tous les poisons qu’on y a introduit et de nettoyer le système économique de l’arbitraire et de la barbarie.
Le système politique doit se doter d’une vision planificatrice pour l’avenir.
Il faudra trouver des alternatives au pétrole et au tourisme.
Tout cela exige que nous nous débarrassions de la haine, de l’inflation de soi, de l’orgueil mal placé et du suprématisme, à savoir que nous formons, comme le dit le coran, la meilleure communauté parmi les hommes !
Sauf votre respect, en vertu de quoi prétendez-vous vous placer au-dessus de tout le monde ?
Si vous prétendez être les meilleures personnes sur terre, vous avez le fardeau de la preuve.
Dites-nous ce que vous avez apporté à l’humanité.
Le dévot qui s’installe confortablement dans la mosquée, pour lire le coran, dans un espace climatisé en plein été, est convaincu qu’il ira au paradis et que celui qui a inventé le climatiseur ira en enfer !
Le fait qu’il existe des gens qui pensent aujourd’hui de cette façon est grave, aussi grave qu’un crime contre l’humanité.
Nous devons donc nous débarrasser complètement de ces idées délirantes, et nouer des liens d’égal à égal avec le reste du monde.
Nous préoccuper de justice, surtout envers les minorités, pour que nous puissions profiter de leur contribution, au lieu de leur faire peur et de leur faire payer le prix de nos complexes.
Rachid :
« Hamed Abd el Samad » je vous remercie.
J’ai appris de vous que vous comptez publier un nouvel ouvrage prochainement, peut-être aurons-nous l’occasion de vous inviter pour en parler.
Quel est le titre de ce nouveau livre?
Hamed Abd el Samad :
C’est un livre qui traite du fascisme religieux, du lien entre l’islam et le fascisme, et des mouvements de l’islam politique qui l’incarnent.
Rachid :
Quand sera-t-il publié ?
Hamed Abd el Samad :
Il doit sortir en janvier prochain au salon du livre si l’édition se déroule comme prévu.
Rachid :
Le fascisme religieux sera donc le titre de votre prochain livre, le même titre que la conférence qui vous a attiré tant d’ennuis.
Espérons que ce livre ne vous en apportera pas d’autres.
Je vous souhaite donc un plein succès et espère vous retrouver dans une autre émission avec la grâce du Seigneur. Merci beaucoup « Hamed Abd el Samad » !
Hamed Abd el Samad :
C’est à moi de vous remercier.
http://www.postedeveille.ca du 24/09/2013
Article paru initialement le 03/10/2013 sous le titre « La chute du monde islamique-fin ».
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